Hangar "Y" à dirigeables - Meudon
 
 
Histoire - Architecture - Affectation Journée avec Audouin Dollfus Les rénovations Modélisation en 3D Wokipi Aerostation
               
Son origine
 

Le Hangar Y est l’un des derniers bâtiments d’aérostation après avoir été l’un des premiers. Il est situé en bordure de la fôret domaniale de Meudon. Ce remarquable emplacement se situe au coeur du lieu le plus ancien de l'aérostation. En effet, c'est à Chalais-meudon que furent implantées, en 1795, les premières compagnies d'aérostiers militaires créées par Nicolas Conté et Joseph Coutelle pendant les guerres de la Révolution.

La Guerre de 1870 et le siège de Paris remettent l’aérostation à l’honneur. Des ballons libres sont utilisés pour assurer les communications entre Paris assiégé et la province. Gambetta, qui avait apprécié les ballons lors de sa fuite de Paris, va créer une commission des «communications aériennes» et le Colonel Charles Renard y sera affecté et chargé de l’aérostation militaire. Il installe à Chalais-Meudon son centre de recherche et en 1877, et devient directeur de cet Etablissement Central de l’Aérostation Militaire avec comme objectif la création d’un corps d’aérostiers. C'est le premier laboratoire expériemental d'aérostation dans le monde. Mais il faut un bâtiment suffisamment grand pour stocker les différents ballons étudiés.

 

J.B Krantz, commissaire général de l'Exposition Universelle de 1878 à Paris, nomme Henri de Dion à la direction de toutes les constructions métalliques de cette exposition. De Dion, dont Gustave Eiffel fut l'élève, supervise ainsi la construction de la Grande Galerie des Machines. Sa réalisation fut confiée à l'entreprise Moisant-Laurent-Savey. Mais De Dion meurt avant la fin des travaux et ne verra pas leur réalisation.

Charles Renard est séduit par les volumes de cette immense Galerie. Après son démontage du Champ de Mars (1979), une partie de cet ouvrage est remonté à Chalais-Meudon pour servir de hangar à ballons et à dirigeables (1981). Ce nouveau hangar est désigné sur le plan de masse par la lettre Y. Le Y étant la marque des militaires, qui avaient désigné par une lettre chacun des bâtiments de leur centre de recherches et de constructions aéronautiques.

Ainsi ancien hall de l’Exposition universelle de 1878, le Hangar Y voit le jour. C'est le premier hangar à dirigeables au monde et c'est aussi un témoignage de l’art de la charpenterie métallique.

Dans les bâtiments les plus proches, dont le « bâtiment Z - appareils à hydrogène », sont produits les gaz nécessaires au gonflement des ballons.

Dans un premier temps le Hangar Y sert à l’amélioration des ballons existants. Des parcs de ballons captifs sont créés. Ils comprennent un matériel roulant traîné par des chevaux pour l’utilisation en campagne, avec treuils à vapeur.

Puis le Hangar Y sert à la construction de dirigeables. Pour ce faire le Colonel Charles Renard reprend les travaux sur les dirigeables en s’inspirant des ballons de Giffard, Dupuy de Lôme et des Frères Tissandier.

 
Son architecture
 

Ce hangar marque un tournant décisif dans l’architecture métallique de la fin du XIXème siècle. C’est à cette époque que De Dion invente la ferme à treillis en deux éléments pour une voûte en coque de bateau, technique reprise ensuite par Eiffel. Son volume libéré jusqu’au faîtage présente un intérêt pour un usage aérostatique.

Cet édifice est un réemploi puisqu'il a été construit en récupérant les portiques métalliques des galeries annexes de la Grande Galerie des Machines de l'Exposition Universelle de 1878.

Mais pour l'adapter à ses nouvelles fonctions, l'ouvrage a été surélevé. La hauteur des parois verticales a été portée à 18 mètres. Deux galleries ont été ajoutées de part et d'autre. L'architecture est celle des églises gothiques, les fermes de bas-côtés évitant le flambement des fermes centrales.

Le mur pignon de la façade sud reprend les éléments de la Grande Galerie des Machines de l'Exposition du Champ-de-Mars. A l'origine, le pignon nord était ouvert pour laisser le passage aux ballons et aux dirigeables. il a été fermé par un remplissage provisoire pendant la Première Guerre Mondiale.

L'intérieur, très lumineux est éclairé par de grandes verrières sur les pignons nord et sud et par un vitrage en partie haute tout le long des façades longitudinales.

Long de 70 mètres, le bâtiment est composé d’une grande nef centrale de 23 mètres de large et 26 mètres de hauteur au faîtage, flanquée de deux bas-côtés en appentis de 9 mètres de large sur 11 mètres de haut. Ce qui lui donne une largeur totale de 41 m et une superficie de : 4 130 m2 (dont 1 610 m2 pour le vaiseau central et deux galeries de 630m2)


Ballon dirigeable "La France" dans le Hangar Y
   
Son affectation
 

Ballon dirigeable "La France"
Renard dessine les plans d’un nouveau dirigeable et s’associe avec un ingénieur de génie, le capitaine Krebs, qui met au point un moteur électrique léger et puissant (8cv), permettant au dirigeable de remonter au vent.

Le 9 août 1884, Charles Renard et Arthur Krebs s’envolent à bord du dirigeable « La France » et effectuent le premier vol en circuit fermé du monde. Partis de Chalais, ils virent au dessus de Villacoublay et se posent à l’endroit exact de leur départ après 7.6 Km d’un parcours effectué en 23 mn. C’est un succès total !

La description exacte de l'expérience du 9 août fut publiée, dès le lendemain, dans le Moniteur universel. Voici comment ce voyage était raconté dans ce journal :

"Hier samedi, 9 août 1884, un aérostat ayant la forme d'un cigare très allongé, muni d'une hélice et d'un gouvernail et mis en mouvement par un moteur mystérieux, d'une puissance étonnante, eu égard à sa légèreté, s'est élevé majestueusement des ateliers d'aérostation de Meudon... Il fallait aux aéronautes une grande audace et une prodigieuse confiance dans leur appareil ... Enfin, après vingt-cinq minutes de voyage, il atteignit exactement son point de départ et descendit, après une série de manoeuvres habiles, dans la pelouse même d'où il s'était élevé....la route de l'air est ouverte"

En 1895, un autre dirigeable plus important, le « Général Meusnier », remplace « la France » dans le Hangar Y. Mais il ne volera jamais.

Ensuite le Hangar hébergea le célèbre dirigeable Lebaudy IV pour servir à l'instruction. Ce dirigeable sera démantelé en 1912.

1914 - 1918 : Pendant la Première Guerre Mondiale, il faut construire rapidement du matériel aérostatique et des ballons captifs d’observation pour les armées du front. En 1915, on édifie un hangar spécial pour abriter l’atelier de fabrication des nacelles en osier. On fabrique aussi à Chalais-Meudon des treuils à vapeur, des générateurs d’hydrogène, des nacelles…
   
On peut lire dans les Carnets de Guerre de Félix Peaucou, ancien aérostier au centre de Chalais-Meudon :

Qu’avions-nous comme ballons captifs militaires en 1914 ?
Des ballons sphériques, d’un vieux modèle…. Un deuxième système de ballon avait bien été timidement conçu en petit modèle et faisait l’objet d’essais en qualité d’engin météorologique. C’était le ballon-cerf-volant dit “Drachen”. Mais il n’en existait aucun d’un cubage assez fort pour pouvoir porter des hommes.

A la fin de 1914, le ballon dit “drachen” commença à se substituer au ballon sphérique dans beaucoup de compagnies. 1916, les drachens disparurent complètement pour faire place aux ballons dits “ballons-captifs-allongés”, conçus par l’ingénieur Caquot.

Lieutenant aérostier, Albert Caquot réalise en 1914 un ballon captif fuselé et équipé de stabilisateurs arrières, capable de tenir à des vents de 90 km/h. Également appelé "saucisse", ce ballon place la France au premier rang des nations dans le domaine de l’observation aérienne.

Durant la Grande Guerre, l’atelier aérostatique de Chalais-Meudon fabrique des "ballons Caquot" pour toutes les armées alliées.
 

En 1919, au lendemain de la Grande Guerre, Albert Caquot, Chef du Service Technique Aéronautique, propose au Ministre de la Guerre la création d’un Conservatoire de l’Aéronautique. Les premiers éléments des collections sont rassemblés dans le hangar de Issy-les-Moulineaux, construit par les établissements Voisin. les premières "Collections de l'Aéronautique" sont présentées au public, mais les crues de la Seine à cette époque sont une réelle menace pour le matériel exposé dans ce hangar. Les collections sont déplacées ""provisoirement" vers Chalais-Meudon.


Le hall du musée de l'air à Meudon avant sa fermeture définitive au public.
En 1921, inauguration du hall d'expositon. Le nouveau Musée de l'aéronautique est installé dans le hangar qui servait à la confection des nacelles d'osier des Ballons d'Observation Caquot et non dans le Hangar Y. Les visiteurs y verront une riche collection d'équipemetns d’aérostation, d’aviation et de très nombreux moteurs qui ont marqué les débuts de l’aéronautique et qui ont survécu à la guerre de 1914-1918. Cette exposition provisoire durera plus de cinquante ans.

C'est aux premiers conservateurs, le capitaine Hirschauer et Charles Dollfus, que le Musée de l'Air actuel du Bourget doit sa richesse. Les collections n'ont cessé de s'accroître depuis, jusqu'au moment où l'encombrement s'est révélé tel qu'on a dû décider d'installer le musée ailleurs.

En 1927, c'est l'Aéronaute reconnu Charles Dollfus qui prend les rênes du Musée. En 1935, le site de Chalais Meudon ferme ses portes afin de permettre le transfert des collections vers son nouvel emplacement, Boulevard Victor à Paris. Ce dernier sera fermé par les Allemands durant la Seconde Guerre Mondiale, et à la fin de la guerre les collections seront rapatriées vers Chalais Meudon.

Mais pendant plusieurs décennies, ce musée va souffrir du manque de locaux pour présenter dans de bonnes conditions toutes ses collections. Le choix s'est alors porté vers le nouvel aéroport du Bourget. Pendant la durée des travaux, étalés sur dix ans, les collections se rapportant aux débuts de l'aérostation et de l'aviation sont restées à Meudon.

A partir de 1973 le musée déménage progressivement de Chalais-Meudon vers l'aéroport du Bourget. En 1975, ouverture au public du premier hall d’exposition du Musée de l'Air au Bourget.
En 1964, Marc Chagall utilisa le Hangar Y pour peindre la voûte rouge et or de la magnifique salle de spectacles de l’Opéra Garnier.

Les hangars de Chalais-Meudon seront visités par le public jusqu’en 1981. En 1982, le Hangar Y est classé monument historique.

La dernière contribution du Hangar Y à la conquête de l’air remonte à juin 2002, avec l’assemblage et le gonflage du premier ballon dirigeable piloté autorisé à voler en France : le Voliris 900.

Le 19 Juin, l'enveloppe longue de 31 m est dépliée et gonflée à l'air pour inspection et installation des soupapes et ventilateurs. Le 20 Juin, essais des commandes de vol électriques, puis le 21 Juin, premier gonflement à l'hélium puis du 22 au 25 Juin, installation des dérives et de la nacelle, essais de pesage, ballonnet etc...

Le 26 Juin, la société Voliris a présenté son premier dirigeable Voliris 900 devant plus de 300 invités. (photo de droite). Début Juillet, l'engin est démonté et rejoint une base en province pour réaliser ses premiers essais en vol. Le Voliris 900 est un appareil professionnel, prévu pour des opérations commerciales, scientifiques ou sportives.

C'est aussi dans le Hangar Y que Jean-Pierre Jeunet a tourné des scènes spectaculaires de son dernier film « Un long dimanche de fiançailles », le hangar étant alors transformé en hôpital de guerre pour les besoins du tournage, du 1er au 4 décembre 2003.

En plus d’être le monument historique le plus ancien du monde dans le domaine de l’aérostation, le hangar Y est classé ZNIEFF, Zone nationale d’intérêt écologique, faunistique et floristique.
   
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